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Ewa

Evaluer l’impact environnemental de la logistique urbaine

Les livraisons aux particuliers augmentent rapidement, et avec la pandémie cette augmentation s’accélère. Or, l’impact environnemental des livraisons est aujourd’hui sous-estimé.

Par Laetitia Dablanc

Comme toute activité qui comporte une part importante de déplacements, notamment routier, livrer en ville émet du bruit et des polluants atmosphériques1. Et les livraisons en ville ont tendance à augmenter : est-ce à dire que leur bilan environnemental est amené inéluctablement à empirer ? Il faut examiner certaines évolutions de près avant de pouvoir répondre.

D’abord, l’accroissement du nombre de livraisons. Selon les enquêtes du LAET, si les livraisons faites en ville auprès des établissements (le Business to Business) sont plutôt stables, en revanche les livraisons aux particuliers (le Business to Consumer) voient leur « intensité » (le nombre d’opérations ramené au nombre d’emplois ou d’habitants) augmenter rapidement2. Depuis le début de la pandémie de Covid-19, on voit même cette augmentation s’accélérer : les Français, en septembre 2020, consomment 26 % de plus en ligne par rapport à février 2020, un taux qui monte à 27 % pour les produits alimentaires3. Avant la pandémie, on comptait en ville environ 0,3 livraison B2C pour une livraison B2B (chiffres LAET), ce ratio a augmenté aujourd’hui.

Une augmentation du nombre de livraisons ne veut pas forcément dire une augmentation, ou une augmentation du même ordre, des nuisances. D’abord, du fait du renouvellement des flottes, les livraisons en ville se font aujourd’hui avec des véhicules moins polluants. Ensuite il peut y avoir des phénomènes de « massification » : plusieurs livraisons faites au même endroit, par exemple un point-relais, qui limitent les circulations. Enfin, une tournée de livraison peut remplacer de façon moins polluante des déplacements personnels pour achats faits en voiture. Mais ces évolutions sont lentes et il reste une part importante de véhicules utilitaires en ville anciens et polluants. C’est en particulier le cas du transport des colis, dont les activités urbaines relèvent de petites sociétés sous-traitantes aux faibles marges et qui peinent à renouveler leurs véhicules. La crise économique actuelle touche beaucoup ces PME et n’arrange pas les choses. Les immatriculations de véhicules électriques le démontrent : alors que le marché des voitures particulières électriques neuves explose, celui des véhicules utilitaires légers électriques se réduit4, ce qui devrait nous interpeller. Une partie de cette baisse peut s’expliquer par la difficulté à commander des véhicules électriques ou les retards de livraison, retardant mécaniquement les immatriculations. Mais l’essentiel vient du manque d’attractivité des camionnettes électriques pour les entreprises de livraison. Une histoire parallèle, bien documentée5, montre que l’on peut inverser la tendance : la municipalité de Shenzhen en Chine a réussi à promouvoir les « véhicules logistiques électriques » (70 000 qui livrent en ville, record mondiale) grâce à un ensemble de politiques volontaristes : des aides à l’usage des véhicules (fonction croissante du taux d’utilisation), le déploiement massif de bornes de recharge et des avantages réglementaires.

Un troisième mécanisme à analyser est celui des instruments de mesure des performances environnementales de la logistique urbaine. Prenons l’exemple du CO2. Dans un récent séminaire du réseau de villes C406, les municipalités ont témoigné de leurs difficultés à effectuer des bilans carbone de la logistique, en raison de données insuffisantes et de modèles de fret urbain peu adaptés. La Ville de Paris évalue régulièrement ses émissions, en distinguant (c’est l’une des rares villes dans le monde à le faire) un secteur « transport de marchandises ». Le « Bilan du Plan Climat Énergie de Paris 2004-2014 » montre pour 2014 un bilan marchandises de 5,3 millions de tonnes de CO2 (21 % du total de la ville), pour moitié lié au transport routier et pour l’autre au transport aérien. Ces émissions seraient en baisse de 18 % par rapport à 2004, dont une baisse de 10 % pour le routier ; or nous venons de voir que le nombre de livraisons urbaines a augmenté. En regardant de plus près l’origine des données et des méthodes, on peut formuler l’hypothèse suivante : le bilan carbone du transport routier sous-estime le nombre de véhicules-km logistiques (la distance totale parcourue par les véhicules de transport de marchandises) notamment parce qu’il sous-estime les flux du B2C7.

Les livraisons urbaines génèrent un impact environnemental, sous-estimé par les méthodologies et les données dont les villes disposent. Il faut maintenant améliorer les outils de diagnostic. Il faudra notamment veiller à mieux prendre en compte le B2C, considérer l’ensemble de la mobilité pour achats (personnelle et professionnelle), ainsi que le trafic des motos et scooters, qui s’est beaucoup accru pour les activités urbaines de livraison.

 

1 En ville, le transport des marchandises génère de 25 % à 30 % des émissions de CO2 liées au transport, 30 % à 40 % des NOx liées au transport, 40 à 50 % des particules liées au transport. Coulombel, N., Dablanc, L., Gardrat, M., Koning, M. (2018) The environmental social cost of urban road freight : Evidence from the Paris region, Transportation Research Part D, 63.
2 Depuis vingt ans, leur nombre tourne autour de 0,5 livraison ou enlèvement par semaine par habitant. Elles n’augmentent qu’à hauteur de l’augmentation de l’activité démographique et économique des villes. Il y a bien sûr quantité d’évolutions sectorielles (les pharmacies, par exemple, reçoivent un peu moins de livraisons par semaine aujourd’hui qu’il y a vingt ans), mais elles ont tendance à se compenser. Toilier, F., Serouge, M., Routhier, J.L., Patier, D., Gardrat, M., 2016. How can urban goods movements be surveyed in a mega-city ? The case of the Paris region. Transp. Res. Proc., 12.
3 BCG/Fox Intelligence –la méthodologie adoptée sur-représente les urbains.
4 Dans un marché global des VP neufs en baisse de 29 % sur les neuf premiers mois de 2020 (Comité des constructeurs français d’automobiles), les immatriculations électriques ont augmenté de 130 % (huit premiers mois de 2020, chiffres AVERE, Association nationale pour le développement de la mobilité électrique). Dans un marché des VUL neufs en baisse de 21 % sur les neuf premiers mois de l’année 2020 (CCFA), les immatriculations électriques ont baissé de 12 % (huit premiers mois, chiffres AVERE).
5 Rocky Mountain Institute, intervention le 7 octobre 2020 dans la Freight Academy 2020, zero-emission vehicles, https://www.c40.org/.
Voir aussi un rapport de 2019 : https://rmi.org/insight/a-new-ev-horizon
6 Freight Academy 2020, citée ci-dessus.
7 Les données utilisées viennent des sources suivantes : les « enquêtes TMV » (LAET), qui datent de 2011 et ne prennent pas en compte les livraisons B2C, « l’enquête VUL » dont la dernière date de 2010 et représente des chiffres France entière (donc sur-estimant les VUL utilisés par les particuliers, peu nombreux à Paris), ainsi que les « enquêtes plaques » de la ville de Paris, tous les deux ans mais qui ne permettent pas de distinguer entre les différents types de VUL (artisans, transporteurs, particuliers).

Ewa

Un manifeste contre les grandes villes. Tous aux champs, vraiment ?

metropole

Le géographe Guillaume Faburel, après avoir dénoncé les « Métropoles barbares », appelle dans un manifeste à en finir avec les grandes villes. Un retour à la terre bien dans l’air du temps…

C’est un thème qu’on n’a pas fini d’entendre. Il était déjà là avant le nouveau coronavirus, on l’entend maintenant que le Covid-19 est là. De ce dernier mal comme de presque tous nos maux, les métropoles sont la cause. Il faut de toute urgence redonner vigueur aux villages, au local, au mieux aux villes moyennes. Guillaume Faburel est l’un des hérauts de ce retour. Avant la crise sanitaire, il avait déjà publié, avec Les métropoles barbares, une critique de la métropolisation. Il sort aujourd’hui Pour en finir avec les grandes villes. Si l’auteur est géographe, professeur d’Etudes urbaines à l’université Lumière Lyon 2, l’ouvrage qu’il publie n’est pas un livre universitaire ou savant. Pas d’appareil critique, il écrit un manifeste, et précisément, comme le dit le sous-titre, un manifeste pour une société écologique post-urbaine.

Le constat que fait Faburel ne surprendra pas. Exemples ? 127 villes « ne pèsent pas moins de 48 % du PIB pour seulement 12 % de la population mondiale ». Il dénonce une « globalisation du béton, responsable à elle seule de 9 % des émissions mondiales de CO2 ». (*) En France, dix-sept des vingt-deux métropoles dépassent très régulièrement les normes d’exposition aux particules fines fixées par l’Organisation mondiale de la santé.

Mais la concentration, la bétonisation, la pollution, les Français ne supportent plus. L’ampleur de ce rejet n’apparaît pas vraiment, du fait de biais statistiques que dénonce Faburel. « Si les villes de Lyon, Bordeaux, Montpellier, Nantes ou Rennes ont gagné de 1 à 2 % d’habitant·es en cinq ans, les dix-sept autres [métropoles] ont un solde légèrement négatif. Pourtant, cette réalité est dissimulée à coups de tours de passe-passe statistiques, en la noyant dans des périmètres plus larges comme les aires urbaines ou en mettant en avant d’autres indicateurs comme le solde naturel. De plus, la population française serait en fait urbaine à seulement 48 %, et non à 80 %, si l’on intégrait le critère de continuité de l’urbanisation et de densité, comme cela a été demandé quinze années durant aux autorités françaises par Eurostat et par l’OCDE. Et même si ces données officielles ont tendance à masquer cette réalité, l’Insee est désormais contraint d’admettre que ce sont aujourd’hui les communes de faible densité qui gagnent en France le plus d’habitant·es, de l’ordre de 0,7 % par an dans les zones rurales, à commencer par douze départements historiquement considérés comme les moins « dynamiques ». Ce « brouillard statistique » des organismes officiels est « tout sauf anodin, l’enjeu étant d’invisibiliser des manières de vivre différentes de celles promues par l’idéologie urbaphilique d’État. »

En réalité, dit-il « tout l’Hexagone se repeuple allègrement. Nombre de ses hameaux, villages et bourgs, y compris dans sa fameuse « diagonale du vide » nord-est/sud-ouest, abusivement présentée comme en déclin, sont ainsi progressivement revigorés par la lassitude métropolitaine. »

Certes, il y a bien la solution qui consiste à rester et à « verdir » la ville mais qui ne trouve pas grâce aux yeux de Faburel, très peu vélo – bobo. Pour lui, les verdisseurs en herbe (si l’on peut dire) sont des « agents involontaires – ou idiot·es utiles – de la métropolisation, participant à la production de la ville « apaisée », « adaptable », « écologique », « vivable » et « durable », dit-il en usant de guillemets qui sont autant de pincettes. Il leur préfère « des collectifs menant des luttes autrement plus politiques. » Et, quoi qu’il en soit, penche pour la solution radicale post-urbaine sur laquelle se termine son livre : « aux champs citadin.es. »

On s’attend à voir vertement (si l’on peut dire encore) critiqué ce manifeste. La métropolisation qu’il dénonce demande sans doute une description plus fine. Des monographies locales montrent le fonctionnement de chaque grande ville, et sa complexité. On peut se référer, par exemple, à la description très fine de Bergame que fit en pleine crise de coronavirus Marco Cremaschi, ce qui l’amène précisément à prendre ses distances avec le « concept catch all » de métropolisation et l’usage qu’en fait Guillaume Faburel dans un précédent texte.

Pour Cremaschi, il faut se défier d’un concept « qui désigne à la fois la densification, le surpeuplement, la promiscuité des modes de vie uniformisés et la surmodernité ; en somme, tout ce qui nous aurait éloignés de la « nature ». Et de préciser : « si l’on exclut les situations de surpeuplement extrême de quelques mégapoles des pays en développement, rien n’indique que la densité de population soit un bon indicateur des relations humaines et en dernière analyse de la propagation des maladies. En effet, comme l’a déjà amplement montré la critique faite à la thèse « écologique » (Offner 2020), les caractéristiques de l’environnement physique ne reflètent que marginalement la culture et les modes de vie. Ce n’est qu’au niveau de la coprésence physique, telle qu’on la trouve dans les transports en commun que la densité de la population conduit directement à une intensification des contacts humains. » Précisons que la mention « Offner 2020 » renvoie au récent livre du directeur de l’agence d’urbanisme de Bordeaux, Anachronismes urbains (Les presses de Sciences Po), dont nous avons largement rendu compte dans notre numéro de juin. Un livre qui invite notamment à se méfier de la vogue des circuits courts et rappelle que la vie sociale et économique s’enrichit de la combinaison des échelles.

Ajoutons qu’un bon connaisseur des villes françaises, Olivier Razemon, auteur de Comment la France a tué ses villes (éditions de l’Echiquier, 2016) dans son blog du Monde, sous un titre faussement naïf, La métropolisation c’est mal mais c’est quoi exactement fait un tableau moins apocalyptique des grandes villes et rappelle aux partisans du retour à la terre qu’il est toujours bien venu de se retrouver au café du coin.

Il n’empêche que Faburel n’est pas seul et que, sans aller jusqu’à nous envoyer tous aux champs, « l’Observatoire en réseau de l’aménagement du territoire européen de l’UE va même jusqu’à recommander un développement territorial s’appuyant sur les réseaux nationaux de villes moyennes, ce afin de réduire les écarts économiques et les inégalités sociales ». Et, ajoute notre auteur, « un groupe d’expert·es français·es du Forum vies mobiles préconise un réaménagement total du territoire autour de ces mêmes villes, en vue cette fois-ci de satisfaire la demande sociale de ralentissement des rythmes de vie. » De fait, à l’issue de sa récente Enquête nationale mobilité et modes de vie, le Think tank de la SNCF veut à la fois « imaginer un aménagement du territoire privilégiant les villes moyennes aux dépens des grandes agglomérations denses et mener une politique de déconcentration de l’activité de l’Île-de-France vers le territoire national. » (voir Réservoir Mob du numéro de mai).

Peut-on ménager la chèvre et le chou ? Par exemple, métamorphoser la métropole pour en faire la mise bout à bout de « villes du quart d’heure », selon les préceptes de l’urbaniste Carlos Moreno. Des villes françaises y pensent. Exemple donné tout récemment par Le Monde, Metz veut faire en sorte que ses quartiers deviennent des villages dans la ville.

On ne sait pas si Faburel verra dans de telles initiatives les dernières tentatives désespérées d’« idiot.es utiles » qui volent au secours des grandes villes condamnées. Quoi qu’il en soit cette dernière initiative montre à son tour que le propos du militant-géographe — qu’on l’approuve ou qu’on soit très réservé — s’appuie sur une tendance forte que le Coronavirus ne fait qu’accentuer.

Là où, par contre, on est pantois, c’est quand Faburel en arrive à la description du fonctionnement des futurs espaces repeuplés de la campagne. On ne sait par quel sortilège tout n’y sera qu’entraide et solidarité, cogestion et réciprocité. « Les nuages et les animaux, la terre et les fougères redeviennent des partenaires » ne craint pas d’écrire notre auteur. On ne peut pas dire que la description qui s’ensuit, et qui combine au charme d’un tract électoral en écriture inclusive celui d’une leçon d’école primaire donne vie à l’utopie. N’est pas Fourier qui veut. F. D.

* De quoi faire pousser des hauts cris à l’architecte Rudi Ricciotti, auteur d’un autre Manifeste, pour le béton celui-ci (Manifeste pour un béton en garde à vue, éditions Textuel, 2015) qui est venu sur France Culture alors même que le livre de Faburel allait sortir, défendre le béton tant décrié, dénoncer l’incompétence de ceux qui le dézinguent, avancer que le bilan carbone du béton rapporté à la durée de vie n’est pas si mauvais que cela, et soutenir que le matériau, à l’origine énorme consommateur de sable, est de plus en plus souvent issu du recyclage.

Ewa

Re-vivre dans la rue

Farge et Mangin

Il est architecte et urbaniste, elle est historienne. Tout à son programme de recherche international sur les rez-de-ville, David Mangin cherche à comprendre non seulement comment fonctionnent aujourd’hui les villes du monde, mais comment fonctionnait la ville au XVIIIe siècle, ce qu’il en était des rues, des cours et des maisons. Qui d’autre rencontrer qu’Arlette Farge, historienne pionnière de la vie quotidienne à Paris au XVIIIe siècle ? Ville, Rail & Transports a assisté à la rencontre. Et, si David Mangin esquisse des parallèles auxquelles en historienne Arlette Farge ne se livre pas… Reste que le dialogue riche fait apparaître les dimensions de la rue d’hier et d’aujourd’hui.

David Mangin. Vivre dans la rue, le titre de l’un de vos premiers livres, cela nous parle. Pour nous, architectes, urbanistes, la rue est un objet mythique.

Le mouvement moderne l’a rejetée, mais, malgré les attaques de Le Corbusier contre la rue corridor — et malgré son talent — elle reste ancrée dans les têtes. Aujourd’hui, dans notre profession, on essaye de « faire de la rue ».

En fait, la rue, on ne sait plus très bien ce que c’est, elle est objet de fantasmes, on fait des simulacres de rue et, de plus, elle est visée par des prédateurs qui veulent la privatiser. Mais elle n’est pas morte.

Après le XVIIIe siècle dont nous allons parler, nous avons connu, avec l’arrivée du trottoir, de la promenade bourgeoise et de la rue haussmannienne, un partage alors nouveau entre espace public et espace privé. Nous entrons aujourd’hui dans une autre période, avec les digicodes et, de ce fait, la disparition d’une profondeur de la rue.

C’est sur ce fond de questions contemporaines que nous retrouvons des questions que vous avez posées, importantes si l’on veut arriver à faire des rues qui ne soient pas que des façades.

« La rue, on ne sait plus très bien ce que c’est… mais elle n’est pas morte », David Mangin.
Paris. Dessin de David Mangin extrait de desire lines, éditions Parenthèses, 2015

Arlette Farge. Au moment où j’ai écrit sur la rue au XVIIIe siècle, c’était un peu tabou. Cela n’a pas tout à fait intéressé les historiens et j’ai alors rencontré les urbanistes.

J’exagère peut-être — et je ne l’ai pas écrit comme cela parce que j’étais alors un peu intimidée — mais la rue, au XVIIIe, c’est le corps des gens de la ville. C’est là que tout le monde va, avec les bords de Seine. Soit on a un besoin économique et marchand, soit on a besoin de travailler, soit on est mendiant — et il y en a énormément — soit on va chez le commissaire de police, parce qu’il s’occupe alors de la voirie autant que de la police punitive. Si je devais récrire le livre, j’écrirais : la rue est un corps, et un corps odorant, ce qui inquiète les étrangers tant les odeurs sont fortes, et c’est aussi un corps d’une sonorité absolue.

La rue est mi-urbaine mi-rurale, il y a beaucoup de bosquets, des buissons, tout un espace hétéroclite, qui permet beaucoup de cachettes, d’endroits où l’on peut se sauver, même dans des rues très étroites. De plus, il n’y a pas d’écriteaux de rue, les premiers n’arriveront qu’en 1728, et les gens vont se mettre en émeute pour que cela n’ait pas lieu.

Il y a les marchands ambulants, un nombre d’animaux gigantesque, la taverne, les violences, la police. Il y a de grands moments de solidarité et des explosions physiques, des rixes extraordinairement violentes. J’ai l’idée d’un corps immense qui s’époumone, crie, essaie de survivre, de ne pas aller en prison… Je simplifie, bien sûr ! Est-on heureux ou malheureux ? C’est une question qu’on ne se pose pas, la vie vous impose cette effervescence des corps, cette singularité des rencontres. Mais, attention ! Cette effervescence n’empêche pas qu’il y ait des codes. On pourrait croire qu’on se tutoie dans la rue. Pas du tout ! Même à la taverne, il y a des codes très précis, très jolis. Vous ne touchez pas le cordon du tablier d’une servante.

David Mangin. Vous développez l’idée qu’au XVIIIe siècle espace public, espace privé, espace intime, sont, dites-vous, « confondus ». Par exemple vous parlez souvent des allées et des escaliers. Que s’y passe-t-il et qu’entend-on par là ?

Arlette Farge. Je ne peux pas séparer le bâti de la façon dont les gens vivent. L’allée, c’est le porche avec un « hall » (on n’emploie alors pas ce mot) qui est fermé à 11 heures du soir, quelle que soit la saison, par le logeur de chaque immeuble. Pendant la journée, l’allée est un lieu de sociabilité et un lieu économique très intense. Les marchands ambulants entrent dans les allées et crient leurs cris habituels, sur des mélodies différentes, pour qu’on ne mélange pas la vendeuse de poisson avec le vendeur de couteaux.

Tout en haut des immeubles, il y a les garnis, ce sont des endroits qui donnent les uns sur les autres. Il n’y a pas de palier, aucune intimité. On y trouve, selon un mot qu’on n’emploie pas au XVIIIe siècle, toute la population migrante, puisqu’il y a alors un formidable exode rural. Les gens qui y vivent sont des célibataires, mot qu’on ne dit pas non plus : la femme qui a quitté le village, qui est venue seule ou avec un enfant, ou bien l’homme qui est venu sans sa femme à la ville. Ce qui produit tout une sociabilité sexuelle normalement interdite par l’église et la police, mais ingérable, ingérée et permanente.

L’escalier est un lieu très particulier. C’est, dans les classes populaires, le lieu de la rencontre et du badinage. Un jeune homme monte l’escalier, une jeune fille le descend, le jeune homme a toujours sur lui un petit ruban ou un petit livre ; si la jeune fille est jolie il va le lui proposer, si elle ne l’est pas il va continuer à monter l’escalier, quant à la jeune fille, même si on ne veut pas le croire, au XVIIIe siècle, elle a la possibilité de résister.

Le marchand ambulant qui entre dans l’allée ne va pas monter. C’est la jeune fille, la servante, ou la femme qui va descendre l’escalier à sa rencontre. Ce qui est intéressant, c’est la vision des corps qu’on a dans les archives de police. Avoir été séduite dans un escalier, c’est très intime, le lieu est plus intime que l’allée, l’entrée ou la rue. Mais je ne voudrais pas qu’on croie que l’escalier est le seul lieu où on badine !

Desires lines
« Je ne peux pas séparer le bâtide la façon dont les gens vivent », Arlette Farge.
Paris/ Oberkampf. Dessin de David Mangin extrait de desire lines , éditions Parenthèses, 2015

David Mangin. Vous parliez de « migrants », même si le mot n’est alors pas utilisé. Il est tentant de faire une transposition avec ce que l’on voit en Chine ou en Afrique aujourd’hui, où il y a beaucoup de migrants, qui se trouvent entre le rural et l’urbain. Comment les migrants rentrent-ils dans la ville ?

Arlette Farge. Le rural au XVIIIe  siècle ne cesse d’aller vers la ville, il va prendre les us et coutumes de la ville. Il les prend très facilement, parce qu’à la ville, il y a plein de chevaux, plein d’ânes, de dindons, de pintades, de troupeaux, et de gens qui conduisent les troupeaux.

David Mangin. Est-ce que les pavés rentrent dans la cour, comme un prolongement matériel de la rue ?

Arlette Farge. Non, presque tout est de la terre meuble. Dans la rue, on patauge… Ce qu’on ne voit jamais restitué dans les séries télévisées historiques. La boue est alors constamment signifiée. « Cette terre meuble… », dit-on. Les domestiques, s’ils ont de la boue sur leur livrée, c’est atroce… mais ils en ont plein. Ceux qui sont le plus choqués, ce sont les Anglais, qui arrivent sur les hauteurs de Saint-Cloud et voient qu’en bas on patauge dans la boue.

David Mangin. Louis-Sébastien Mercier dans son Parallèle de Paris et de Londres dit : la ville commence avec le trottoir. Et, aujourd’hui, nous regardons comment les trottoirs se fabriquent par exemple dans les faubourgs d’Hyderabad. L’un fait son paillasson devant sa maison, un autre fait de même, tout le monde se met plus haut que la chaussée et c’est après qu’on fait un trottoir public.

Beaucoup de choses aujourd’hui, dans les cités, se passent dans les escaliers ou dans les ascenseurs. Dans les parkings aussi. Certes les parkings, c’est moche, ce n’est pas écolo… On peut diminuer la place de la voiture et j’en conviens tout à fait mais, si on dépasse une hostilité de principe à la voiture, on observe des pratiques incroyables sur les parkings. Pour certaines personnes, c’est une extension du logement. On y donne rendez-vous pour Le Bon coin, on y achète sa voiture, on la répare, on y déjeune, on y fait une partie de foot, et ce carré de béton devient un espace public, bien plus que des places très artificielles de villes nouvelles qui n’ont jamais marché.

Je m’intéresse à de tels lieux émergents, sans grande présence physique. Par exemple, les blanchisseries automatiques. C’est blafard, mais il s’y passe beaucoup de choses, surtout pour les migrants, les célibataires. Il y aura de plus en plus de lieux semblables, où les rapports entre les gens s’autogèrent. Ils sont surveillés, sous caméra, mais il s’y fabrique de petites sociabilités, qu’on trouve beaucoup moins aujourd’hui dans le commerce classique, du fait des applis. Il y aura de plus en plus de lieux comme ça : small talk et petites sociabilités.

Arlette Farge. Je préfère le ruban dans l’escalier…

David Mangin. Dans La Ville franchisée, on a relevé de plus en plus d’espaces publics ou pseudo-publics. Par exemple un parking de supermarché est gratuit, mais il est privé et surveillé par des vigiles, et on ne peut pas y distribuer un tract. Mon hypothèse, c’est que vont se développer des endroits bâtards, entre public et privé. Ce sont des questions très actuelles. Par exemple, les urbanistes essaient de faire des îlots qu’on puisse traverser. En réalité, très vite, dès la première réunion de copropriété, les gens disent : « On ne veut pas que les gens utilisent notre allée, on laisse éventuellement passer les enfants le matin pour aller à l’école, etc. ». On n’arrive pas à faire une ville traversable à pied. J’en suis arrivé à la conclusion qu’on ne va pas échapper à ce qu’impose ce sentiment de sécurité, avec les codes et autre systèmes numériques mais, au moins, qu’à l’échelle des cours, on peut arriver à faire des choses, des logements donnant sur des cours qu’on puisse traverser… On peut aussi arriver à travailler dans les cours, avec des machines silencieuses… Un retour au XVIIIe ?

Arlette Farge. Les ateliers, au XVIIIe, sont tous à ciel ouvert, et il n’y a pas de trottoir, on travaille dans la rue et, dans les cours aussi, tout le monde travaille en plein air. Mais cela fait du bruit ! Les gens sont incommodés par les bruits, ils le disent, ils le manifestent.

David Mangin. Mettre plus d’informel dans l’urbanisme formel est en effet difficile. Un des grands problèmes, c’est l’aménagement des rez-de-chaussée. Tout le monde pense à mettre du commerce en rez-de-ville, mais on voit bien que le commerce, le travail et le domicile dans la rue du XXIe siècle ne fonctionnent pas comme ça. Il faut se poser la question de façon plus large. La difficulté vient aussi de la façon de décloisonner. Des cartes faites par Google signalent les endroits où des gens paient pour être sur Google… Y compris, au quatrième étage, grâce à une appli… Comme en Asie, où il n’y a aucun problème pour faire du commerce au cinquantième étage ou au niveau moins cinq. Cela va venir. On marche dans la rue, une appli va signaler que le coiffeur se trouve ici… Si on n’est pas sur la carte on crève. Google va rentrer dans la profondeur de la ville et dans l’intimité. En même temps, il y a des limites à ce développement, changer l’usage d’un local dans une assemblée de copropriétaire n’est pas simple. Mais aujourd’hui, on fait des quartiers sinistres parce que ce qu’on est dans un saucissonnage très strict.

Arlette Farge. Au XVIIIe siècle au contraire, il y a un très grand mélange de population. La rue, c’est l’espace dans lequel vivent les classes populaires mais, à Paris, dans le Marais, les hôtels sont mélangés aux immeubles pauvres.

Et une grande marquise, aux Champs-Elysées, elle descend de carrosse avec son chiot, tout petit et gavé de whisky, et là, les femmes, les petites marchandes s’approchent, viennent toucher sa robe— et la marquise ne dit rien. Les gens se voient.

Propos recueillis par François Dumont


Les acteurs publics pris de vitesse par Google

On connaît le danger que peut représenter Google à Toronto (voir VRT n° 625-626). Les risques d’emprise ne se limitent pas à la conception d’un quartier de ville. On peut aussi redouter une main mise sur la ville existante. Vraiment Vraiment, agence définissant son activité comme le « design d’intérêt général », a publié en octobre 2019 une étude sur le sujet, dont Alexandre Mussche, de Vraiment Vraiment, a rappelé la teneur lors de la table ronde sur le commerce et les rez-de-ville du 27 février.

Selon cet article, « Google, via ses différents avatars (Maps, Sidewalk Lab, Google Ads, Waze), se donne progressivement les moyens d’être l’intégrateur le plus puissant des données urbaines dans toute leur diversité. » Les données agrégées dessinent un portrait parfois surprenant mais dans l’ensemble assez fidèle de la ville. Elles « sont cruciales à qui prétend comprendre et transformer la ville ». Or, relève Vraiment Vraiment, « à l’instar de l’insertion de Google Maps sur un site, devenue payante après 10 ans de gratuité, le géant numérique semble ainsi approfondir sa stratégie en trois bandes » :

1. Offrir des outils gratuits aux usagers, basés notamment sur des données publiques

2. Installer un monopole

3. Revendre aux collectivités ces données/outils.

Comme le relève l’étude, au-delà de la simple requête d’itinéraire, les applications de plans deviennent des outils structurants de notre quotidien, « véritables moteurs de recherche multi-critères ». Google se met donc « en pôle position dans le MAAS (en vendant directement dans Maps des trajets Uber, Lime, TC) ». Et, grâce à une fonction de catalogue, les commerçants sont « invités depuis peu à partager en temps réels leurs stocks, étalages, promotions ».

De plus, à l’aide de la réalité augmentée, Google est en train de rendre lisible ce qui se passe derrière les murs et dans les étages, ce qui « va bouleverser la façon de faire enseigne et de faire vitrine », qui ont jusqu’à présent « façonné les formes de la rue ».

Or, regrette Vraiment Vraiment, « les acteurs publics semblent totalement dépourvus d’ambition et d’outils pour analyser de façon critique les stratégies UX (User Experience) des acteurs numériques et leurs conséquences économiques, sociales, culturelles et politiques. Cet angle mort les prive d’une capacité à détecter des signaux faibles pour penser la fabrique de la ville de demain (…), voire conduise tout droit à la confiscation par les nouveaux acteurs de ce qui fait l’essence même de la ville. »

Et de rêver de collectivités territoriales aptes à proposer, à l’inverse de ce que fait Google, une politique publique de la flânerie…

F. D.

Ewa

Cécile Maisonneuve, La Fabrique de la Cité : « On avait tous envie de croire aux promesses du numérique »

Cécile Maisonneuve_La Fabrique de la Cité

Entretien avec Cécile Maisonneuve. La directrice de la Fabrique de la Cité* décrypte pour Ville, Rail & Transports les effets des plateformes numériques sur la congestion urbaine et réinterroge le lien entre numérique et mobilité.

Ville, Rail & Transports. Calculateurs d’itinéraires, VTC, covoiturage : des acteurs privés déploient dans des temps records de nouvelles solutions de mobilité à des prix compétitifs. Dans un récent rapport, vous déconstruisez les promesses du numérique. Pourquoi ?

Cécile Maisonneuve. La mobilité reste le terrain de jeu favori des plateformes numériques et la congestion, leur meilleur ennemi. En quelques années, le numérique s’est imposé dans le paysage de la mobilité au point que ces nouveaux services sont perçus comme essentiels par les citadins. Une étude du bureau de recherche 6T indique que les utilisateurs d’Uber apprécient le côté pratique et le prix compétitif de la plateforme par rapport aux taxis ou aux transports en commun. De leur côté, les calculateurs d’itinéraires vendent l’idée qu’ils réduisent les temps de conduite. Les déplacements sont au cœur d’enjeux cruciaux dans la lutte contre le réchauffement climatique mais aussi pour l’attractivité économique des villes : accès à l’emploi et aux infrastructures sociales. On avait donc tous envie de croire aux promesses du numérique. Mais, à lui seul, le numérique n’est pas une solution, il n’a d’utilité que s’il s’insère dans la complexité des systèmes de mobilité et que s’il est combiné à des actions sur l’infrastructure, les rythmes et les lieux de travail. Or, les start-up développent des solutions autoporteuses, et les concentrent sur le cœur des métropoles. Elles y trouvent leur public mais les problèmes de mobilité ne sont pas là, l’offre y est déjà pléthorique.

VRT. Pourtant, elles ne sont pas rentables.

C. M. Elles ne cherchent pas à engranger des bénéfices, mais des données pour les monétiser en recettes publicitaires, les vendre aux villes, et lever des fonds sur les marchés. Le but n’est pas de gagner de l’argent, elles sont dans une logique de capitalisation boursière et de data. Loin de la logique de désengorgement du trafic urbain martelé dans leurs slogans publicitaires.

VRT. Vous affirmez même que les outils numériques accentuent la congestion urbaine.

C. M. Prenez Waze par exemple, l’application de guidage qui se propose de « déjouer le trafic », ou Citymapper qui veut « simplifier la ville ». En réalité, les start-up se nourrissent des failles de notre système de mobilité, notamment pour les déplacements banlieue – banlieue. Le problème est qu’elles ont induit du trafic sur des routes où il y en avait peu, provoquant des nuisances pour les habitants, et des pertes de valeurs immobilières. A Boston, Uber a vidé les transports en commun. A New York, la marche a reculé drastiquement et les embouteillages se sont aggravés. Si Uber et consorts facilitent la mobilité en proposant par simple pression sur un smartphone d’avoir une voiture en quelques minutes, ce sont près de 50 000 véhicules supplémentaires qui circulent dans la ville de New York par exemple. Nous n’avons pas encore les chiffres sur Paris [on sait déjà que les automobilistes y perdent 237 heures par an dans les embouteillages, +7% par rapport à 2017. Source : INRIX, Traffic Scorecard 2017].


Sur le même sujet, lire : La mesure anti Waze du maire de Bègles


VRT. Grâce aux données, les villes ont-elles tout de même une meilleure connaissance des déplacements et des usages ?

C. M. Oui, les villes sont désormais en mesure de savoir d’où viennent et où vont les personnes qui se déplacent, où elles sont, et quels sont leurs motifs de déplacements. C’est beaucoup plus rapide qu’une enquête ménage ! Le numérique apporte de nombreuses informations, comme la vitesse de circulation, les incidents, indispensables pour comprendre la congestion mais il ne la réduit pas, au contraire. Je ne crois pas à la démobilité, c’est contraire à l’activité humaine et économique. Aujourd’hui, nous devons interroger les modes de déplacement post-carbone et leur financement. Je crois que l’on ne pourra pas échapper au tarif de congestion dans les métropoles denses, y compris pour les véhicules électriques, avec un système de taxation au nombre de kilomètres parcourus. L’OCDE appelle déjà les Etats à y réfléchir. En Californie, il y a maintenant des bouchons de véhicules propres sur les voies réservées aux véhicules électriques !

Propos recueillis par Nathalie Arensonas

*La Fabrique de la Cité est un think tank dédié à la prospective et aux innovations urbaines, créé par le groupe Vinci.

Ewa

Le modèle Montréal

Montréal, ville hôte ce mois-ci du congrès de l’Union internationale des transports publics, est célèbre pour son réseau de galeries souterraines en centre-ville, connecté au métro. Modèle analysé et questionné par les urbanistes et architectes, dont dernièrement, David Mangin et Marion Girodo, avec Seura architectes, dans leur livre Mangroves urbaines. Que nous apprend Montréal ? Le Grand Paris peut-il s’en inspirer ? Entretien avec Marion Girodo.

Ville, Rail & Transports. Montréal est connu pour son important réseau de galeries en souterrain. En France, on associe souvent la réalisation de ce réseau au climat rigoureux du Canada.

Marion Girodo. Ce n’est pas la seule raison de la naissance de ce réseau, officiellement nommé Reso, et que certains nomment Ville intérieure. Ce système est bien connu et a été largement décrit, analysé par des architectes, des urbanistes, des économistes. S’il s’est développé, c’est parce que, à la fin des années 50 et au début des années 60, la ville était dans une phase de restructuration urbaine et de dynamisme international. Montréal était la première métropole canadienne, même si Toronto, déjà, la rattrapait. On avait prévu de faire un grand CBD (Central Business District) en faisant tabula rasa du tissu urbain ancien, et il y avait la perspective de l’Exposition universelle de 1967. Le climat d’émulation générale a facilité la création de ce Reso.

 

VR&T. D’où le mouvement est-il parti ?

M. G. De la gare centrale. Donc d’un réseau de transport même si, au Canada comme aux Etats-Unis, du fait du rôle de l’autocar ou de la voiture individuelle dans les déplacements, les réseaux de transport nationaux n’ont pas du tout l’importance qu’ils peuvent avoir en France. Au début des années 60, la gare centrale est donc réaménagée. L’opérateur, Canadian National, possède des terrains autour et veut valoriser son foncier. Il fait appel à Ieoh Ming Pei…

 

VR&T. …déjà, « notre » Pei…

M. G. Oui, c’est un des architectes que l’on retrouve dans notre travail sur les mangroves urbaines, à Montréal, à Singapour et à Paris. L’opérateur canadien fait appel à Pei, donc, et à un urbaniste, Vincent Ponte, qui vont imaginer une première opération connectée directement à un lieu de transport, Place Ville-Marie. Ils imaginent que le centre-ville va être aménagé selon ce modèle, consistant à relier des bâtiments entre eux sans que les usagers aient à passer par l’extérieur pour aller de l’un à l’autre. Il n’y a pas alors de plan-guide en tant que tel, mais la ville accompagne le mouvement. Elle met à disposition des droits d’utilisation du sous-sol public et, quand les opérateurs privés arrivent, ils se greffent sur le système préexistant, créant un nouveau segment du réseau. Tout se fait progressivement, sur un temps long. Et la porte d’entrée principale de ce Reso, c’est le transport en commun, avec la gare centrale, refaite en 1962 et le réseau de métro, inauguré en 1966.

 

VR&T. Aujourd’hui le système est-il achevé ?

M. G. Il y a eu des développements lors des années 2000, il doit prochainement y en avoir un autour d’un grand hôpital, mais cela va évoluer a minima. Pour le CBD, on arrive à une stabilisation du système, il ne devrait plus vraiment être prolongé. Et, ailleurs, il n’y a pas de densité urbaine suffisante. Quand on sort du centre de Montréal, on est tout de suite dans du résidentiel – ou, plus loin dans de l’activité – donc il n’y a plus forcément de raison d’édifier un tel réseau. Cela n’a de sens que quand il y a une intensité urbaine importante, de forts flux d’usagers.

 

VR&T. Comment le système est-il reçu ?

M. G. Cela reste un modèle international très connu. De façon positive… Mais négative aussi. Il y a des gens qui jugent que c’est affreux de faire un centre-ville comme cela, intérieur, qu’ils assimilent de plus à une ville 100 % commerciale. Ce qui n’est pas exact, car il y a des secteurs liés à des équipements publics, d’autres à des universités et, globalement, une diversité programmatique qui n’est pas du tout inintéressante.

Dans la plupart des grandes villes du monde, dès qu’il y a un réseau de métro, il y a, à un moment, une ou deux stations qui se connectent à un bâtiment, c’est ce que nous proposons de nommer « mangrove urbaine ». Mais le système qui en résulte est rarement aussi important ou étendu qu’à Montréal. Son réseau principal fait environ 33 km de long et il est assez tentaculaire, desservi par sept stations de métro. Et il y a trois sous-réseaux, dont chacun s’est greffé sur une seule station de métro. Et ce qui est intéressant, c’est que, même s’ils sont petits par rapport au réseau principal, ils sont en réalité aussi grands et complexes que les plus importants systèmes parisiens comme le pôle Saint-Lazare-Haussmann.

 

VR&T. Vous invitez dans votre livre à ne pas confondre mangrove urbaine et urbanisme souterrain…

M. G. A Montréal, comme dans les autres mangroves urbaines d’ailleurs, le système ne se résume pas au souterrain. Tout d’abord, la ville est construite dans la pente. Si on regarde le réseau central en coupe, à l’ouest on est dans des espaces souterrains et, plus on va vers l’est, plus on est aérien, tout en restant relativement au même niveau. Ensuite, tout l’intérêt de ces systèmes, c’est que l’on peut passer directement du métro à des bâtiments, à leurs rez-de-chaussée, aux programmes qui se trouvent dans les étages et même, dans un certain nombre de cas, à leurs toits-terrasses, du haut desquels on peut admirer la ville. Alors, on est parfois en souterrain, parfois on ne l’est pas et ce n’est pas ce qui est important. Ce qui importe, c’est la continuité de l’espace, la liberté de circulation entre le réseau de transport en commun et d’autres lieux. On est dedans, dehors, dessus, dessous et, finalement, on ne sait plus très bien à quel niveau on se trouve. Ce qui est essentiel, c’est que les espaces de transition et les espaces intérieurs soient aménagés de façon agréable. Ce n’est pas toujours facile, quand on est sur du couloir pur et dur. A Montréal, ils sont globalement réussis, et certains sont presque devenus de vrais lieux publics. Des gens y patientent sur un banc comme ils le feraient dans un parc ou ils y suivent des cours de yoga. Pourtant, il ne faut pas oublier que ce sont des espaces privés, contrôlés, ouverts seulement aux heures d’ouverture du métro.

 

VR&T. La ville intérieure est née avec le métro. Comment évolue-t-il à Montréal ?

M. G. Le centre-ville est très bien desservi. Il va y avoir, à ma connaissance, des extensions du métro pour desservir de nouvelles zones. Dans les années 60, on a parallèlement créé, à Montréal, de grandes infrastructures routières, ce qui a amené un très fort étalement urbain. La question d’aujourd’hui, c’est de desservir les gens qui vivent très loin, tout en faisant une ville durable, etc. Problématique que l’on retrouve ailleurs, à ceci près que Montréal, ayant développé un réseau de transport en commun très dense en son centre, est beaucoup mieux desservi que bien des villes nord-américaines.

 

VR&T. Pourquoi avoir appelé ces systèmes, de Montréal, de Singapour, de Paris et d’ailleurs, des « mangroves urbaines » ?

M. G. Parce qu’ils n’ont pas été identifiés en tant que tels. Chaque opérateur regarde sa partie, le transport en commun ou le bâtiment, alors que la réalité des usages, c’est la continuité spatiale d’un espace à l’autre. C’est ce que nous avons voulu raconter. En montrant que les lieux ne devraient pas être si sectorisés. On souhaite dépasser le côté chacun dans sa petite boîte.

 

VR&T. Comment a pu se faire ce dépassement à Montréal ?

M. G. Il s’est fait naturellement, les opérateurs se sont mis d’accord entre eux lorsqu’ils ont conduit de grandes opérations architecturales et urbaines et ils ont été accompagnés par les pouvoirs publics. Chaque ville le fait à sa façon. A Paris, c’est plutôt le public qui prend en charge la création de ces mangroves urbaines, à Singapour, c’est le secteur privé, mais à partir des prescriptions du public…

 

VR&T. Cela va-t-il continuer à se passer à Paris ?

M. G. A notre sens, un certain nombre de nouvelles mangroves urbaines vont être créées, autant donc les anticiper au mieux.

 

VR&T. A vous lire, on a l’impression que la Société du Grand Paris a un peu fermé la porte au développement de ces systèmes. Est-ce le cas ?

M. G. Oui et non. La première fois qu’il a été question des gares du Grand Paris Express, la SGP a communiqué des schémas en disant : les stations de métro d’hier fonctionnent avec des sorties de part et d’autre des quais et provoquent une dispersion sur l’espace public ; les stations de métro de demain auront un grand puits souterrain et une seule entrée/sortie avec un unique parvis. Il a même été dit que les futures gares n’auront pas de couloir souterrain. Comme d’autres architectes, nous nous sommes dit : « Quel est le rapport à la ville ? Comment cela va-t-il fonctionner, sachant que 80 % des stations seront connectées à d’autres réseaux ? »

VR&T. Où en est-on aujourd’hui ?

M. G. Les architectes des futures gares ont été sélectionnés et leurs projets publiés. Et, quand on les analyse, on voit bien que ces gares sont connectées aux réseaux de transport existants, qu’il y aura effectivement des couloirs souterrains. Mais aussi qu’il y aura des bâtiments qui viendront se greffer au-dessus des gares et qu’une attention particulière est donnée à l’insertion urbaine de ces gares. Ce ne sera pas tout à fait ce que nous appelons des mangroves urbaines, parce que, pour aller de la gare aux bâtiments, il faudra repasser par l’extérieur, mais on n’en est pas très loin.

 

VR&T. D’autres occasions en France de repenser la question ?

M. G. On attend, l’appel à projets « Réinventer les sous-sols de Paris » qui, dans la suite de « Réinventer Paris », va conduire à repenser des sujets proches. Il y aura là une opportunité de trouver de nouvelles façons d’articuler espaces souterrains et ville aérienne.

Propos recueillis par François DUMONT

Ewa

Voies sur berge : bataille de chiffres à l’horizon

Avoir quatre comités de suivi et d’évaluation concurrents, n’est-ce pas une des meilleures façons de s’assurer d’obtenir des résultats discordants ? Et de pouvoir mieux continuer à s’écharper ensuite

Dans le dossier de la piétonnisation des voies… sur berge rive droite, la confiance est tellement rompue, qu’on en est arrivé à une aberration : un comité instauré par la préfecture de police, un autre supervisé par la Ville de Paris, un troisième constitué par la région et un dernier par la métropole ! Une situation que dénonce Michel Herbillon, le député-maire (LR) de Maisons-Alfort, également vice-président à la Métropole du Grand Paris.

L’édile prêche pour « un seul comité d’évaluation à l’échelle régionale et métropolitaine puisque c’est bien celle impactée par la piétonnisation ». Et regrette que l’interdiction de circuler sur la voie Georges-Pompidou, vécue comme brutale, soit « la façon dont s’incarne pour les citoyens la Métropole nouvellement créée et dont Anne Hidalgo est d’ailleurs vice-présidente. Car cette décision est funeste pour leur vie quotidienne ». La Métropole s’empare en effet des questions de mobilité que ce soit sur la Seine (voir également notre article sur les navettes fluviales) ou sur ses berges. Preuve en est l’installation le 10 octobre, par son président Patrick Ollier, de l’Observatoire métropolitain de l’expérimentation de la piétonnisation des voies sur berges rive droite.

Le même jour, le comité régional – celui de la région et du Stif – de suivi et d’évaluation des impacts de la piétonnisation des voies sur berge rive droite à Paris rendait son premier rapport d’étape. Premières conclusions : « très peu de résultat d’évaluation à cause d’un manque de données », affirme le rapport. Partant de là, on est en droit de se questionner sur la valeur des premiers chiffres présentés par la Direction de la voirie et des déplacements de Paris qui font état d’un accroissement de trafic automobile sur les quais hauts rive droite d’une part et sur le boulevard Saint-Germain, d’autre part, allant de « seulement » 4 à 73 %.

Par ailleurs, la région a élargi le champ d’investigation. Son rapport fait état d’une dégradation de la circulation sur le périphérique entre les portes de Saint-Cloud et de Sèvres. Sur les quais hauts, le comité compte des temps de parcours entre les Tuileries et Le Châtelet plus que doublés le soir (+135 %) par rapport à 2015. De plus, conséquence paradoxale, la piétonnisation devant inciter à prendre les TC, les bus qui sont trop souvent bloqués aux carrefours voient leur temps de parcours s’allonger de quelques minutes. Cependant, la RATP conclut que « globalement, il n’est pas possible à ce stade d’évaluer l’impact spécifique de la fermeture des voies sur berge sur la circulation des bus ».

De son côté, Michel Herbillon rappelle que la métropole a proposé une concertation à Anne Hidalgo, afin de mettre en place la piétonnisation vivable, avec de réelles alternatives de déplacement pour les Franciliens. Il répète que la majorité régionale n’est pas opposée sur le principe. « Ce serait trop facile de nous taxer de “vieux ringards tout-bagnole”, insiste-t-il. Le problème, c’est la méthode autocratique alors qu’aucune solution de transport n’est prête. » Il estime aussi que la possibilité d’une piétonnisation partielle ou bien certains jours ou à certaines heures de la journée aurait dû être examinée.

Le député-maire de Maisons-Alfort rappelle enfin le rapport négatif de la commission d’enquête « qui est un réquisitoire contre la décision : pas d’impact positif sur la pollution, périmètre d’impact trop restreint, la voie express Georges-Pompidou n’est pas une voie communale, contrairement à ce qu’affirme Anne Hidalgo ». Quant à la décision du préfet d’instaurer une période expérimentale de six mois, il craint qu’il ne s’agisse d’une « mascarade, un rideau de fumée pour calmer l’agitation ». Il n’adhère pas « au concept fumeux d’évaporation de la circulation ». Et ne décolère pas devant les arguments employés pour le convaincre : « On m’a affirmé que la voie Georges-Pompidou n’était utilisée que par des catégories socioprofessionnelles “plus”. Probablement en font partie tous les artisans et commerçants en estafettes qui viennent des villes du Val-de-Marne ? »

Paris-Est-Marne et Bois, un territoire intercommunal de 13 municipalités val-de-marnaises va très probablement déposer un recours juridique contre la décision entachée d’illégalité. En attendant, l’élu préconise le report de la décision unilatérale, ainsi qu’une vraie concertation entre Ville de Paris, Métropole du Grand Paris et région Ile-de-France, « afin qu’on mette en place une solution de transport qui accompagne la fermeture à court ou moyen terme, pas en 2024. Or pour l’instant, nous avons toujours un refus de Paris. Autant dire que la métropole est utilisée à géométrie variable, selon qu’elle sert ou non les intérêts de la capitale ! »

cecile.nangeroni@laviedurail.com

Ewa

Paris : Des tours vertes et des fermes… en 2050

L’agence Vincent Caillebaut Architectures (VCA) et la société d’ingénierie Setec Bâtiments ont planché, à la demande de l’Hôtel de Ville, sur ce que pourrait être le visage de Paris en 2050… Ils proposent à des endroit stratégiques de la capitale des tours de bureaux et de logements, dont l’alimentation énergétique pourrait être fournie par les pas des voyageurs, beaucoup d’arbres, des éoliennes… De quoi répondre aux préoccupations de la municipalité qui souhaite réduire de 75 % les émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050.

Ewa

GPRC 2014 Prix modernisation

 

Le vainqueur

Le Francilien donne des couleurs à l’est et à l’ouest de l’Ile-de-France

 

Les nominés

– Avec l’anti-enrayage, le Transilien passe mieux l’automne

– Le renfort de l’offre sur la ligne 14  

Le vainqueur

Le Francilien donne des couleurs à l’est et à l’ouest de l’Ile-de-France

C’est en décembre 2009 que les voyageurs l’ont vu pour la première fois, entre Paris-Nord et Luzarches. Mais c’est en 2013, une fois résolus ses défauts de jeunesse, que le Francilien est véritablement devenu le train des Franciliens. Après avoir éliminé les rames Inox de la banlieue nord en janvier 2013, ce nouveau train a été mis en service dans les mois suivants sur les réseaux de banlieue de Paris-Est et Saint-Lazare. A l’est de la capitale, la première liaison équipée a été la ligne P vers Meaux, le 11 février 2013. En dehors des heures de pointe, le Francilien, dont la caisse large et l’aménagement coloré ne laissent personne indifférent, a remplacé sur cette liaison les rames tractées RIB-RIO rénovées et les automotrices à deux niveaux Z2N, capacitaires mais à l’aménagement intérieur spartiate.

Toujours sur la ligne P, la relation vers Coulommiers a reçu ses premiers Franciliens le 7 octobre suivant. Entre-temps, le nouveau train a été mis en service sur le réseau de Paris-Saint-Lazare le 14 juillet 2013, en commençant par la ligne L (Nanterre-Université). Puis, en avril 2014, les premières rames sont arrivées sur la ligne J, entre Paris et Ermont – Eaubonne, ainsi que vers Pontoise. En 2015, les 172 rames de la tranche ferme devraient avoir été livrées par l’usine Bombardier de Crespin. Au-delà de cette échéance longtemps redoutée, le site nordiste poursuivra la production du Francilien, 43 rames supplémentaires ayant été commandées par le Stif en décembre 2013 pour les lignes H, K et L du Transilien.

 

Les nominés

Avec l’anti-enrayage, le Transilien passe mieux l’automne

L’enrayage lors du freinage sur des rails rendus glissants par les feuilles mortes, phénomène qui endommage les roues des trains et rend ces derniers indisponibles, sera-t-il bientôt un mauvais souvenir ? Si ce problème ne se pose pas sur les trains les plus récents du réseau Transilien, comme le Francilien ou le tram-train, sortis d’usine équipés d’anti-enrayeurs, les matériels les plus anciens doivent être équipés après coup. Ceci vaut en particulier pour les voitures à deux niveaux (VB2N) de la ligne N, c’est-à-dire de la banlieue de Paris-Montparnasse. Même si la durée de vie résiduelle de ce matériel n’est que de 10 à 15 ans, le bénéfice apporté par son équipement l’emporte sur le coût, comme l’a montré le RER D, dont le parc a connu 52 % d’immobilisations en moins une fois équipé. C’est ainsi que le parc de la ligne N devrait être équipé à 85 % cet automne et à 100 % en 2016. Le montage des équipements Faiveley et Freinrail est réalisé par la SNCF dans une nouvelle chaîne créée à cette fin au Technicentre de Trappes.

 

Le renfort de l’offre sur la ligne 14

Depuis le 6 juin dernier, selon une décision du conseil du Stif, durant l’heure de pointe du matin (8h00-9h00), les jours de semaine, la fréquence des métros est passée de 95 à 85 secondes, soit 4 métros de plus par sens. C’est l’un des intervalles les plus serrés au monde. Cela représente un renfort d’offre de 10 %. Par ailleurs, six passages supplémentaires de métro par sens entre 16h00 et 20h00 ont été décidés pour répondre aux besoins des voyageurs pendant cette période. 600 000 personnes empruntent chaque jour la ligne 14, quinze ans et demi après son inauguration, en octobre 1998. Rappelons que l’offre va être renforcée par la suite, avec l’arrivée de rames à huit voitures au lieu de six. 

 

 

 

Ewa

GPRC 2014 Prix Aménagement urbain

 

Le vainqueur

Les SMR écoconçus des tramways T5, T7, T6 et T8

 

Les nominés

– Les escaliers mécaniques d’Issy-les-Moulineaux

– La rénovation de la gare Saint-Lazare enfin achevée  

Le vainqueur

Les SMR écoconçus des tramways T5, T7, T6 et T8

Qui dit nouvelles lignes de tramway dit nouveaux sites de maintenance et de remisage (SMR). Et leur écoconception a été particulièrement poussée, reprenant certains choix de la RATP pour le SMR du T2 inauguré en juin 2012 à Colombes, comme la toiture végétalisée, la gestion des eaux de pluie ou le recyclage des eaux de lavage…

Construit pour le T5, ligne sur pneus en service depuis juillet 2013, le site de Pierrefitte-sur-Seine est équipé de 423 m2 de cellules photovoltaïques. Le SMR du T6, à Vélizy-Villacoublay, inauguré en octobre 2013, soit un an avant cette autre ligne sur pneus, se distingue par sa charpente de bois. La qualité environnementale se manifeste ici par le contrôle des consommations d’eau, de gaz et d’énergie du site, ainsi que par l’emploi d’éclairages à Led.

A Vitry-sur-Seine, le SMR du T7, ligne inaugurée en novembre 2013, donne une place prépondérante à la lumière naturelle afin de limiter la consommation d’énergie. Une centrale solaire y produit l’eau chaude, les eaux de pluies sont récupérées et celles du lavage recyclées à 100 %, enfin, la centrale de traitement d’air est à récupération d’énergie.

Enfin pour le T8, le SMR de Villetaneuse inauguré le 26 mai dernier, l’isolation thermique a fait l’objet d’une attention particulière : le hall de maintenance et le bâtiment d’entrée sont à « haute performance énergétique » et un « puits canadien » rafraîchit naturellement l’air en été et le réchauffe en hiver. Et côté production d’énergie, 144 panneaux photovoltaïques sont installés sur le toit de l’atelier.

 

Les nominés

Les escaliers mécaniques d’Issy-les-Moulineaux

A la suite de l’abandon du téléphérique qui devait relier la mairie d’Issy-les-Moulineaux au Fort d’Issy est née l’idée d’un projet d’escaliers mécaniques reliant la gare Issy du RER C au Hauts d’Issy et au quartier des Épinettes. Confiées à GPSO, la communauté d’agglomération Grand Paris Seine Ouest, maître d’ouvrage, et à l’Atelier Mosca Architectes, lauréat de la consultation infrastructure à l’été 2010, les trois volées successives de doubles escaliers mécaniques ont été mises en service début juillet dernier. Les escaliers fonctionnent de 7 heures à 22 heures tous les jours. Ils permettent de gravir 26 mètres de dénivelé.

 

La rénovation de la gare Saint-Lazare enfin achevée

Restait pour parachever la métamorphose de Saint-Lazare à soigner son entrée. C’est fait avec l’ouverture du nouveau parvis en mai. L’immense chantier, au terme de dix ans de travaux, a converti la gare en pôle multimodal contemporain multipliant services et commerces sur le chemin des voyageurs tout en respectant un patrimoine exceptionnel. De même, les nouvelles cours de Rome et du Havre, jouant sur les nuances du gris, assurent l’inscription harmonieuse du parvis dans le quartier historique. Tout en offrant aux 128 millions de personnes qui le traversent chaque année ce qu’Arep, l’agence filiale de SNCF qui en est la réalisatrice, qualifie de « salons urbains » : deux espaces privilégiant l’accès aux modes doux et repoussant les voitures à la périphérie ou en sous-sol. Pavés de granit, plantés de fauteuils, de magnolias, d’écrans avancés d’information et des deux sculptures d’Arman restaurées, ils invitent à faire une pause dans ce quartier extrêmement dense de bureaux et de shopping en train de devenir aussi le e-quartier de la capitale. 

 

Prix Modernisation

 

 

 

Ewa

GPRC 2014 Prix Intermodalité

 

Le vainqueur

Le dézonage du passe Navigo

 

Les nominés

– Créteil-Pompadour, nouveau pôle multimodal du Val-de-Marne

– Les bornes « trouver mon transport » à Orly  

Le vainqueur

Le dézonage du passe Navigo

Cela a commencé le 1er septembre 2012, par le dézonage du forfait Navigo, les week-ends, du vendredi minuit au dimanche minuit, ainsi que les jours fériés. Cette aubaine permet aux abonnés de se déplacer dans toute la région et jusqu’en zone 5 quel que soit leur forfait. En 2013, le dispositif a été appliqué pendant les vacances d’été. Cette année, les petites vacances sont venues s’ajouter, à commencer par celles de printemps, du 12 au 27 avril. Et cela va être le tour des vacances de Toussaint, de Noël et d’hiver. Mais le plus important, c’est l’été. Cette année, la mesure a été appliquée du samedi 12 juillet au dimanche 17 août. Elle concerne les détenteurs d’un forfait Navigo annuel ou mensuel, Améthyste ou « Solidarité transport mois ». Les élèves et étudiants détenteurs d’une carte Imagine R bénéficient déjà de ce dispositif. Quant aux détenteurs d’un forfait zones 1-5, non concernés par le dézonage puisqu’ils ont par définition accès à toutes les zones, ils ont eu droit à un coup de pouce du Stif, avec une réduction de 7,5 % pour les mois de juillet et août.

670 000 Franciliens, cette année, se sont déplacés librement pendant la période du dézonage estival. Soit une augmentation de près de 10 % par rapport à l’an dernier. En tout, grâce au dispositif, 3,2 millions de voyageurs peuvent se déplacer plus de 170 jours par an dans toute l’Ile-de-France. Mais on n’en est qu’à mi-chemin puisque l’idée est toujours de parvenir à un dézonage total. Jean-Paul Huchon, président de la région, voudrait conclure les discussions d’ici la fin de l’année pour appliquer la mesure courant 2015 ou fin 2015. Une fois trouvé le bon mécanisme permettant de financer les 300 millions d’euros que doit coûter la généralisation du dézonage.

 

Les nominés

Créteil-Pompadour, nouveau pôle multimodal du Val-de-Marne

Etabli dans un « no man’s land » routier et ferroviaire, non loin du célèbre carrefour du même nom, la gare de Créteil-Pompadour est en premier lieu un pôle d’échanges entre le RER D et deux lignes de bus en site propre (TVM et 393) irriguant le Val-de-Marne. Ouvert le 15 décembre 2013, ce pôle s’articule autour d’une passerelle piétonne de 120 m de long reliant la station de bus reconstruite (sous la maîtrise d’ouvrage du conseil général du Val-de-Marne et de la RATP) et la gare proprement dite, sous laquelle s’arrête le bus O de la Strav. Conçu par l’Arep (maître d’ouvrage) et construit par GTM TP IDF (filiale de Vinci Construction France) le bâtiment de cette gare repose à 9 m du sol sur une structure associant pieux profonds et pilotis. Ce bâtiment léger et lumineux comprend un hall voyageurs de 385 m2, des locaux techniques, des bureaux (où la SNCF assure la formation des agents du RER D) et doit accueillir un commerce. Le quai central de cette gare, la première à avoir été ouverte sur la commune de Créteil, a été construit sous maîtrise d’ouvrage RFF.

 

Les bornes « trouver mon transport » à Orly

Une initiative bien utile pour les touristes qui débarquent dans la capitale par l’aéroport d’Orly et craignent soit de se perdre, soit de se faire arnaquer par un faux taxi ou un chauffeur indélicat. Depuis septembre 2013, ils trouvent dans le terminal d’Orly Ouest, trois bornes interactives, installées par ADP, qui calculent l’itinéraire en transports en commun ou en taxi, en fonction du nombre de voyageurs et de bagages ainsi que de critères comme la rapidité, les correspondances, la marche. Trilingue – français, anglais, espagnol –, la borne détaille la durée totale, les horaires et le prix du transport et la feuille de route s’imprime ou se garde dans un smartphone en flashant le QR Code.

 

Prix Aménagement urbain

Prix Modernisation